Interview Aline Zeler : "Si l'on veut développer le football féminin en Belgique, il faut le professionnaliser dans son ensemble"

Aline Zeler : "Si l'on veut développer le football féminin en Belgique, il faut le professionnaliser dans son ensemble"
Photo: © photonews

Alors que le championnat d'Europe féminin vient de débuter, nous avons rencontré Aline Zeler, 111 sélections avec les Red Flames, qui nous parle des pistes pour développer le football féminin en Belgique.

Le championnat d’Europe féminin vient d’ouvrir ses portes. À l’aube de la première rencontre de nos Red Flames face à l’Islande, nous avons rencontré l’ancienne joueuse de cette équipe nationale Aline Zeler, 111 sélections, qui nous parle des pistes pour développer le football féminin en Belgique et pour se rapprocher d'autres nations européennes qui ont adopté la professionnalisation du milieu.

Walfoot : Bonjour Aline Zeler. Avez-vous le sentiment que l'engouement de la presse et des spectateurs à propos de ce championnat d'Europe féminin est en augmentation par rapport à celui que vous avez connu lors du premier grand tournoi de l'Histoire de cette équipe, en 2017 ?

"Il y a une amélioration de l'engouement dans les journaux francophones, et je pense que c'est très bien. Nous avions connu la même chose en 2017, mais il est important que ça soit le cas durant toute l'année. Durant les qualifications, l'engouement doit rester le même. Une campagne, c'est fait pour se préparer à une grande compétition. Il faut créer cette ambiance de manière constante et montrer le travail des joueuses quand elles évoluent dans leur club. Les filles qui décident de rester en Belgique pour des raisons familiales, scolaires ou professionnelles doivent gouter à cet aspect médiatique, car énormément de joueuses de notre championnat ne sont pas professionnelles." 

Cela signifie donc que beaucoup de joueuses se rendent au travail durant la journée et viennent à l'entraînement le soir ? 

"Oui, et cela ne permet pas à certaines joueuses de s'expatrier. Quand on arrive en équipe nationale, il y a un mélange de joueuses amateures, semi-professionnelles et professionnelles. Certaines joueuses se considèrent comme moins bonnes parce qu'elles restent en Belgique. Si les médias pouvaient rendre à l'aise ces joueuses en leur portant de l'intérêt et en leur montrant du respect, cela les aiderait beaucoup. Cela doit se faire lors des qualifications, lors des rencontres amicales, mais aussi lors des rencontres de Super League." 

Pour développer davantage le football féminin en Belgique, il faut donc professionnaliser le milieu ? 

"La fédération demande à chaque club de mettre trois joueuses sous contrat semi-professionnel. Cela crée un déséquilibre au sein de l'équipe. La plupart des filles travaillent durant la journée et ne peuvent venir s'entraîner qu'en soirée, tandis que d'autres sont disponibles toute la journée. On essaye d'adapter leur programme, de leur donner des exercices physiques à réaliser chez elles, mais il est impossible d'avoir un équilibre de cette manière. Il faut veiller à l'équilibre social, familial, professionnel et scolaire. Je pense qu'on doit d'abord professionnaliser le staff, et veillez à distribuer l'argent correctement, surtout lorsque l'on en a peu." 

"Si l'on veut un football féminin performant, il faut que les entraînements en journée deviennent la norme. Ces équilibres existent dans d'autres pays, ce qui prouve que c'est jouable. Les femmes ne veulent pas l'égalité, mais l'équité. On ne peut pas comparer le football féminin et le football masculin, chacun doit rester à sa place. Il faut regarder le football féminin avec des yeux différents que lorsque l'on regarde du football masculin. Il faut l'égalité des chances d'avoir accès à une formation. Un jeune garçon de 8 ans reçoit une formation. Une jeune fille de 8 ans doit également pouvoir recevoir une formation adaptée à ses capacités. Nous n'avons pas le même corps et la même constitution physique, mais les conditions à organiser le sport doivent être les mêmes. C'est très important."

Dans les pays où le football féminin est professionnel, comment est-ce que cela se déroule ? 

"Je suis récemment allée en France, où l'intégralité des équipes de première division ont un budget compris entre 500.000 et 1.000.000 €. Les entraînements se font en matinée, et chaque club a engagé quelques personnes à temps plein dont le travail est de partir à la recherche de sponsors. En Belgique, les clubs doivent regarder sur le plus long terme. Cela ne sert à rien de rechercher des sponsors à 1.000 € qui ne seront pas reconduits la saison prochaine." 

"Dans l'ensemble, je dirais qu'il faut rendre accessible le football féminin à tout le monde. On veut que les clubs masculins ouvrent leurs portes au football féminin. Les filles doivent avoir accès au sport."

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